Si les pratiques religieuses traditionnelles ont tendance à être de moins en moins suivies par les Philippins, tout espoir n’est pas perdu du côté des jeunes générations. Les plus âgés considèrent certes le temps du carême comme une période de jeûne et d’abstinence, pendant les quarante jours et non seulement pendant la semaine sainte. Mais avec le temps, cette pratique semble s’être affaiblie. Il est donc surprenant d’entendre des jeunes demander, ces jours-ci : « À quoi renoncez-vous pour le carême ? » Une question qui ressort souvent parmi les jeunes de la « génération Y », qui parlent d’économiser, de renoncer à telle ou telle habitude, ou de donner davantage de pourboires aux livreurs ou aux chauffeurs… Beaucoup d’entre eux s’efforcent d’éviter la viande le vendredi, quand d’autres s’engagent à marcher davantage tous les jours. Ces temps-ci, quelles que soient leurs origines ou leur histoire, les jeunes catholiques philippins veulent parler de « changement », et ils trouvent de l’espoir dans ce qu’ils décrivent comme une « redéfinition du concept de sacrifice ».
Le père Luis Lorenzo, de la congrégation des Légionnaires du Christ, appelle lui aussi à un regard nouveau sur la pratique de la foi. « Afin de pouvoir mieux suivre le Christ, il me faut l’aimer davantage », confie le père Lorenzo, ordonné prêtre il y a seulement un an. Il ajoute que la « conversion » survient après tous les « sacrifices… le jour du dimanche de Pâques ». « Je deviendrai une meilleure personne, mais cela ne se fera pas tout de suite, il faut aller jusqu’au bout de la Passion de Jésus. C’est cela que veut dire le carême », souligne le prêtre, à l’image de ce que ressentent les jeunes comme lui.
« On offre quelque chose afin de suivre le chemin de sacrifice vécu par le Christ », confie-t-il, ajoutant que « sacrifice » ne signifie pas se faire du mal. « Vous offrez un sacrifice parce que cela vous aidera à aimer davantage », souligne le père Lorenzo, ajoutant que Jésus a souffert « non pas parce qu’il recherchait les clous ou la couronne d’épines… Il a souffert par amour ». Le prêtre affirme que la manière de vivre ces sacrifices de carême a évolué avec les années, surtout parmi les jeunes. Ainsi, plutôt que de se demander à quoi renoncer durant le carême, le prêtre suggère aux jeunes de se demander si ce qu’ils font les rend meilleurs. « Si c’est le cas, n’y renoncez pas. Est-ce que je dois renoncer au café ? Pensez-y, est-ce que le café vous rend meilleur, est-ce que cela vous aide dans votre travail ? Si c’est le cas, n’y renoncez pas », ajoute-t-il.
Aujourd’hui, le père Lorenzo travaille avec des lycéens et des étudiants, en tant que directeur du groupe d’évangélisation Mission Youth Philippines. Il cherche notamment à donner aux jeunes « l’occasion de se laisser inspirer par la foi des pauvres, et en retour, de partager leur foi avec eux ». « Cela permet à tous de faire grandir en eux la compassion, la charité et le sens du service », assure le prêtre. Dans ses échanges avec les jeunes, il les appelle non pas à faire des sacrifices mais plutôt à « mieux servir, aimer et prendre soin des autres ». Le prêtre ajoute qu’il espère que les jeunes comprennent que le carême ne s’arrête pas le jour du Vendredi Saint, mais que l’on découvre toute « la beauté du sacrifice de Jésus à la Résurrection ».
(Source : Missions Etrangères de Paris)