Chaque dimanche ou Solennité, le Père Anh Nhue Nguyen, secrétaire général à Rome de l’Union Pontificale Missionnaire, livre à notre réflexion son commentaire missionnaire biblique.
28ème dimanche du Temps Ordinaire (Année C) – 2R 5,14-17; Ps 97; 2Tm 2,8-13; Lc 17,11-19
Pape Léon XIV, Jubilé du monde missionnaire et Jubilé des migrants
Messe, Homélie, Place Saint-Pierre, 5 octobre 2025
[…] Nous sommes ici parce que, près de la tombe de l’apôtre Pierre, chacun de nous doit pouvoir dire avec joie : toute l’Église est missionnaire, et il est urgent – comme l’a affirmé le Pape François – qu’elle « sorte pour annoncer l’Évangile à tous, en tous lieux, en toutes occasions, sans hésitation, sans répulsion et sans peur » (Exhort. ap. Evangelii gaudium, n. 23).
L’Esprit nous envoie poursuivre l’œuvre du Christ dans les périphéries du monde, parfois marquées par la guerre, l’injustice et la souffrance.
[…] Nous sommes appelés à renouveler en nous le feu de la vocation missionnaire. Comme l’affirmait saint Paul VI, « il nous appartient de proclamer l’Évangile en ce moment extraordinaire de l’histoire humaine, une époque vraiment sans précédent, où des sommets du progrès jamais atteints auparavant s’associent à des abîmes de perplexité et de désespoir, eux aussi sans précédent » (Message pour la Journée missionnaire mondial, 25 juin 1971). […]
Le moment est venu, comme l’affirmait le pape François, de nous mettre tous dans un « état permanent de mission » (Evangelii gaudium, n. 25).
Tout cela exige au moins deux grands engagements missionnaires : la coopération missionnaire et la vocation missionnaire.
Tout d’abord, je vous demande de promouvoir une coopération missionnaire renouvelée entre les Églises. Dans les communautés de tradition chrétienne ancienne comme celles d’Occident, la présence de nombreux frères et sœurs du Sud du monde doit être saisie comme une opportunité d’échange qui renouvelle le visage de l’Église et suscite un christianisme plus ouvert, plus vivant et plus dynamique. En même temps, chaque missionnaire qui part pour d’autres terres est appelé à habiter les cultures qu’il rencontre avec un respect sacré, en orientant vers le bien tout ce qu’il trouve de bon et de noble, et en y apportant la prophétie de l’Évangile.
Je voudrais ensuite rappeler la beauté et l’importance des vocations missionnaires. Je m’adresse en particulier à l’Église européenne : aujourd’hui, nous avons besoin d’un nouvel élan missionnaire, de laïcs, de religieux et de prêtres qui offrent leur service dans les terres de mission, de nouvelles propositions et expériences vocationnelles capables de susciter ce désir, en particulier chez les jeunes. […]
Commentaire
Méditations de Pierre Diarra, ancien collaborateur des OPM France*
« Tous les dix n’ont-ils pas été purifiés ? Les neuf autres, où sont-ils ? Il ne s’est trouvé parmi eux que cet étranger pour revenir sur ses pas et rendre gloire à Dieu ! » Ces paroles de Jésus peuvent sembler provocantes. L’étranger est donné en exemple. En effet, il revient sur ses pas pour remercier Jésus et rendre gloire à Dieu. Jésus va plus loin en lui disant : « Relève-toi et va : ta foi t’a sauvé. » L’étranger a cru qu’il était bien guéri et que c’était l’œuvre de Jésus mais aussi l’œuvre de Dieu. Pour lui, il n’y a aucun doute, Jésus a quelques liens privilégiés avec Dieu, puisqu’il peut guérir. Et les autres qui ne sont pas étrangers, pourquoi ne sont-ils pas revenus sur leurs pas ? Pensent-ils avoir droit à cette guérison, parce qu’ils sont juifs ? Dieu, leur sauveur, le leur doit, n’est-ce pas ? Est-ce parce qu’ils doutent que leur guérison ne soit pas complète ? Est-ce parce qu’ils veulent poursuivre leur route pour aller se montrer aux prêtres, comme Jésus le leur a demandé ? Dès que l’on a trouvé Jésus, est-il encore besoin d’aller voir des prêtres de l’alliance ? Toutes ces questions nous poussent à réfléchir, à nous interroger de façon fondamentale sur les liens que nous devons entretenir avec le Seigneur Jésus. Si nous considérons les dons, bienfaits et grâces que Dieu nous accorde, comme quelque chose qui nous est dû, nous aurons du mal à remercier le Seigneur. Nous aurons du mal à reconnaître son amour gratuit, le salut offert sans aucun mérite de notre part. Nous ne serons pas pressés de rendre grâce.
Nous sommes invités à rendre grâce, sans cesse. N’est-ce pas la première signification de l’Eucharistie ? Nous sommes invités à chanter avec le psalmiste cette hymne au Seigneur, roi de l’univers et de l’histoire. C’est un « chant nouveau » signifiant, dans le langage biblique, un chant parfait, plénier, solennel qu’il faudrait accompagner d’un apparat musical festif : la harpe, la trompette et le cor, mais peut-être aussi d’un applaudissement des mains et même un applaudissement cosmique. La mer, les montagnes, la terre et le monde entier, en particulier les habitants de la terre sont invités à chanter les merveilles de Dieu, à danser de joie devant le Seigneur. Notre reconnaissance doit nous pousser à rendre grâce de tout notre cœur, par tout notre être, en chantant, en battant des mains, en jouant des instruments de musique comme si nous avons associé toute la création à notre action de grâce.
« Notre Dieu » est au centre de la scène d’acclamation et du chant festif. Lui, le Créateur, opère le salut dans l’histoire et il est attendu pour « juger », c’est-à-dire gouverner le monde et les peuples, pour leur apporter, en bon souverain, la paix et la justice. L’histoire d’Israël est évoquée, avec les images de sa « droite » et de « son bras très saint » qui renvoient à l’Exode, à la libération de l’esclavage en Égypte, mais aussi au désert où Dieu n’a pas laissé son peuple mourir de faim. Dieu a donné aussi à son peuple sa Loi, des règles pour se conduire. L’alliance avec le peuple de l’élection est rappelée, avec les deux grandes perfections divines : l’amour et la fidélité. Ces signes de salut sont destinés à tous, à toutes les nations et à toute la terre. Ainsi, toute l’humanité et même la création toute entière vont être attirées vers le Dieu sauveur, le Dieu-Amour annoncé dans le Premier Testament. Tous les êtres humains sont invités à s’ouvrir à la parole du Seigneur et à son œuvre salvifique. Tous sont invités à accueillir la Parole et au-delà le Seigneur lui-même.
La grande danse d’action de grâces devient l’expression d’une espérance et même une invocation : « Que ton règne vienne ! » Quelle joie de participer à l’instauration du Règne de Dieu ici-bas : un règne de paix, de justice et de sérénité qui envahit toute la création ! Ce psaume dévoile, sans doute, une prophétie de l’œuvre de Dieu dans le mystère du Christ. Dans l’Évangile en effet, la justice de Dieu s’est révélée (Rm 1, 17), manifestée (Rm 3, 21), comme l’apôtre Paul le signifie aux Romains. Dieu sauve son peuple, et toutes les nations de la terre sont dans l’admiration. Dans la perspective chrétienne, Dieu opère le salut dans le Christ et tous les peuples sont invités à profiter de ce salut. Il n’est plus réservé au peuple de l’Alliance ; la nouvelle Alliance ouvre le salut à tous. L’Évangile est puissance de Dieu pour le salut de tout être humain qui est devenu croyant, le juif comme le païen (Rm 1, 16). Non seulement toutes les nations ont vu le salut de « notre Dieu » (Ps 97, 3), mais elles l’ont reçu ou, de diverses manières, le salut est offert à tous.
Le « chant nouveau » du psaume peut apparaître comme une invitation à célébrer par anticipation la nouveauté chrétienne du Rédempteur crucifié. Quelle joie pour les croyants d’acclamer le Ressuscité, le jour de Pâques mais aussi à chaque fois qu’est célébré, dans l’Eucharistie et en particulier le dimanche, le Mystère de notre salut. Le Christ a souffert la Passion comme homme, mais il a sauvé comme Dieu. Il a fait des miracles parmi les Juifs, purifié des lépreux, donné à manger à un peuple innombrable et, comme d’autres prophètes, ressuscité des morts. Mais pourquoi mérite-t-il un chant nouveau ? Parce que Dieu est mort pour que les hommes aient la vie. Parce que le Fils de Dieu a été crucifié pour faire de nous des fils adoptifs et nous introduire dans le Royaume, au Ciel, auprès du Père.
Si nous sommes morts avec le Christ, avec lui nous vivrons. Si nous supportons l’épreuve, avec lui nous régnerons. Si nous le rejetons, lui aussi nous rejettera, mais sa tendresse et son pardon restent offerts. Si nous manquons de foi, lui reste fidèle à sa parole, car il ne peut se rejeter lui-même. Il est l’expression de l’amour le plus fort, le plus pertinent ; il n’y a pas de plus grand amour que de donner sa vie pour ceux qu’on aime. Vous êtes mes amis, si vous faites ce que je vous commande. Aimez-vous les uns les autres comme je vous ai aimés (Jn 15, 12-15). Le Salut offert demeure disponible pour tous. L’Esprit Saint reste offert, d’où l’importance de garder présent dans notre cœur cette parole de Paul : Souviens-toi de Jésus Christ, ressuscité d’entre les morts, le descendant de David ! Au jour d’épreuves et de persécutions, que la foi au Crucifié ressuscité nous donne la joie de chanter, sans faiblir, un chant nouveau en honneur du Dieu-Amour ! Celui-ci nous invite, en toutes circonstances, à proposer à tous nos contemporains le salut en Jésus Christ. Nous sommes des « disciples-missionnaires » !
*Le Père Anh Nhue propose pour ce dimanche la méditation du professeur Pierre Diarra et profite de l’occasion pour le remercier à nouveau pour ce texte.
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Évangile
« Il ne s’est trouvé parmi eux que cet étranger pour revenir sur ses pas et rendre gloire à Dieu ! » (Lc 17, 11-19)
Alléluia. Alléluia.
Rendez grâce à Dieu en toute circonstance :
c’est la volonté de Dieu à votre égard
dans le Christ Jésus.
Alléluia. (1 Th 5, 18)
Évangile de Jésus Christ selon saint Luc
En ce temps-là,
Jésus, marchant vers Jérusalem,
traversait la région située entre la Samarie et la Galilée.
Comme il entrait dans un village,
dix lépreux vinrent à sa rencontre.
Ils s’arrêtèrent à distance
et lui crièrent :
« Jésus, maître,
prends pitié de nous. »
À cette vue, Jésus leur dit :
« Allez vous montrer aux prêtres. »
En cours de route, ils furent purifiés.
L’un d’eux, voyant qu’il était guéri,
revint sur ses pas, en glorifiant Dieu à pleine voix.
Il se jeta face contre terre aux pieds de Jésus
en lui rendant grâce.
Or, c’était un Samaritain.
Alors Jésus prit la parole en disant :
« Tous les dix n’ont-ils pas été purifiés ?
Les neuf autres, où sont-ils ?
Il ne s’est trouvé parmi eux que cet étranger
pour revenir sur ses pas et rendre gloire à Dieu ! »
Jésus lui dit :
« Relève-toi et va : ta foi t’a sauvé. »