13 Oct 2019

Evangélisation : "Satan hait la mission !"

moine de Solesmes

Dom Jean-Philippe, moine de Solesmes, a collaboré au Manifeste ©A.FINISTRE

Dans le Manifeste pour la mission, les moines de Solesmes ont réalisé un travail de bénédictin en récapitulant la place du témoignage dans la Bible, les Pères et tout le magistère. Entretien avec Dom Jean-Philippe.

« La mission n’est pas l’apanage d’un petit groupe d’illuminés », est-il écrit dans Le Manifeste pour la mission. Mais n’est-il pas risqué d’associer une abbaye grégorienne aux initiatives missionnaires les plus audacieuses ?

La liturgie nous ouvre sans cesse à tous les peuples, notamment par le chant quotidien des psaumes. Ainsi, lorsqu’on nous propose de participer à un tel projet, nous sommes d’emblée partie prenante. Sans effort.

Vraiment ? Les contemplatifs ne sont-ils quand même pas à l’arrière du front missionnaire ?

Il y a deux patrons des missions : saint François Xavier et sainte Thérèse de l’Enfant-Jésus, qui a passé dix ans au carmel de Lisieux. Pourquoi est-elle la patronne des missions ? Elle a consumé toute sa vie au carmel pour les missions, en offrant notamment ses souffrances pour les missionnaires. Que faut-il comprendre ici ? Le Christ, avant de monter au Ciel, dit à ses Apôtres : « Allez dans le monde entier porter l’Évangile. » Mais Il précise avant, en saint Luc : « Surtout ne partez pas avant d’avoir été rempli de l’Esprit Saint. » Les moines vont, de façon cachée, prier pour que les missionnaires se laissent remplir par l’Esprit Saint et guider par Lui.

Mais la mission reste l’apanage des autres en dehors du monastère ?

Pour un moine bénédictin, la mission n’est pas de sortir, mais d’accueillir. Nous sommes missionnaires dès la porterie, notre sourire est missionnaire. Dans la règle de saint Benoît, il y a un chapitre entier sur l’accueil des autres en quête d’oxygène spirituel. Sans accueil, notre vie tomberait dans la routine. Les visites que nous recevons stimulent en nous cette ouverture du cœur à tout homme de bonne volonté qui frappe à notre porte.

Dans le monde, par où commence la mission ?

La mission commence par la famille ! Les époux sont missionnaires l’un pour l’autre par la grâce du mariage. Ensuite, ils deviennent missionnaires auprès de leurs enfants. Enfant, j’ai appris le Notre Père avec le sourire, mais je me refusais à apprendre le Je vous salue Marie… Ce combat est toujours l’œuvre de Satan qui veut bloquer les missionnaires. Le missionnaire part à la guerre quelque part et il a besoin de toutes les armes spirituelles. Le moine a ce combat spirituel quotidien qu’il livre en communion avec les missionnaires.

Comment percevez-vous la déchristianisation de la France et, plus largement, de l’Occident ?

J’éprouve de la tristesse, et, en même temps, nous sommes ainsi poussés à rejoindre le Cœur de Jésus et de Marie avec beaucoup d’espérance. Plus il y a de misère, plus la miséricorde de Dieu éclate, comme l’ont annoncé sainte Thérèse de l’Enfant-Jésus, sainte Faustine ou encore le pape François par l’Année de la miséricorde qu’il a voulue. Dieu est miséricorde : il faut crier sur les toits !

Comment analysez-vous ce réveil missionnaire en France incarné par le Congrès Mission ?

Nous l’observons comme un bon fruit du concile Vatican II qui a beaucoup insisté sur l’évangélisation. Le Concile lui consacre un décret qui a été repris dans une encyclique de Jean-Paul II (Redemptoris missio) qui insiste sur le fait que tout chrétien est missionnaire. Nous sommes en train de redécouvrir le Concile qui passe comme une rosée sur l’Église. Les semences de Vatican II sont en train de lever ! Il est évident pour moi que le Congrès Mission est un fruit excellent de Vatican II. Cela me remplit d’une grande joie et d’une grande espérance.

Vivez-vous ce même réveil dans votre monastère ?

Comme prêtre, je fais l’expérience de ce réveil par l’accompagnement spirituel et le sacrement de la réconciliation. Dans la confession surviennent de véritables merveilles, des conversions radicales du cœur, un « non » au péché et une vraie ouverture à l’amour.

Dans ce livre, vous insistez beaucoup sur l’importance du sacrement de la confirmation. Pourquoi ?

Dans la confirmation, vous mettez Jésus au centre de votre vie. L’évêque trace une croix sur le front du confirmant en demandant à l’Esprit Saint de le remplir. Pourquoi ? Saint Thomas d’Aquin répond dans la Somme théologique que nous rougissons sur le front. Or, le confirmé ne rougit pas de la croix. Il en témoigne comme le grand signe de l’amour de Jésus pour nous et le signe qui nous sauve.

Les moines avancent sur deux rails : l’eucharistie et le sacrement de la pénitence. Plus nous voulons être missionnaires, plus il nous faut rouler sur ces deux rails.

 « Le missionnaire est libre de tout souci temporel, il ne s’attarde pas en conversations mondaines » , écrivez-vous. C’est aussi le cas du moine ?

Le péché, nous dit saint Jean, vient soit de l’amour de l’argent – et le moine ne possède pas un euro –, soit de l’abus de sexe. Il y a un combat du moine pour que son affection, son cœur profond soient uniquement au Christ. Enfin, il y a l’obéissance. Comme Jésus pendant trente ans a été soumis à Marie et à Joseph, le religieux, par amour, se soumet à l’Église et à son supérieur. Le moine est ainsi libre par rapport à l’argent, par rapport à l’amour dénaturé. Cette liberté est celle des Apôtres lorsqu’ils sortent du Cénacle. Ils sont libres de tout intérêt personnel, ils partent pieds nus, abandonnés à l’Esprit de Jésus pour annoncer la Bonne Nouvelle. Le moine participe ainsi à cette liberté des missionnaires.

Que voudriez-vous dire aux participants du Congrès Mission à Paris ?

Je leur dirais ce qui suit. Comme vous, les moines avancent sur deux rails : le rail de l’eucharistie et le rail du sacrement de la pénitence. Plus nous voulons être missionnaires, plus il nous faut rouler sur ces deux rails. Si vous pouvez aller à la messe chaque jour, allez-y ! Mon père me disait : « Chaque fois que tu communieras non par routine mais pour t’unir au Christ, tu seras plus heureux dans l’Éternité. » Et j’ajouterais, plus tu seras missionnaire, car le Christ vient en toi pour t’envoyer en mission. Le Christ a été envoyé par son Père, nous sommes nous envoyés par le Christ pour porter du fruit. Le missionnaire, comme le moine, et comme tout chrétien, va rencontrer Satan qui hait la mission et qui cherchera à le faire tomber. Mais la pénitence est le meilleur moyen de ne pas tomber dans les pièges du démon. Propos recueillis par B.Coste pour Famille Chrétienne.

A lire :

Manifeste pour la mission
Auteur : Samuel Pruvot et Raphaël Cornu-Thénard
Editeur : Salvator
Nombre de pages : 192

Le nombre de Français assistant à la messe dominicale est passé sous la barre des 5 %. Notre collaborateur Samuel Pruvot et Raphaël Cornu-Thénard, ancien président d’Anuncio, refusent de se résoudre à une totale paganisation de notre pays. Pour lutter contre cette « déchristianisation qui avance comme un désert », les deux hommes, parmi les fondateurs du Congrès Mission, ont choisi cette fois d’écrire.

Dans Manifeste pour la mission, ils proposent d’explorer dix pistes pour (r)allumer la foi dans le cœur des Français : l’urgence de l’évangélisation, le droit pour tous de connaître Dieu, le courage d’annoncer Jésus ou encore le fait que chaque baptisé est un missionnaire avec son charisme propre. Ils nous offrent ainsi un ouvrage enthousiasmant au sens propre du terme : rempli de Dieu et de son Esprit Saint !

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